Rappel

LA DESCENTE EN RAPPEL

Cette manœuvre est employée pour descendre une paroi infranchissable en désescalade. Elle consiste à fixer sa corde au sommet de la paroi en la passant à travers un ancrage, soit au milieu de la corde, soit en nouant 2 cordes ensemble par l’une de leurs extrémités, puis à se laisser glisser le long des 2 brins de corde jusqu’au point de rappel suivant.

L’origine du mot « rappel » provient du fait qu’une fois arrivé au bas de la descente, on « rappelle » sa corde en tirant l’un des 2 brins, l’autre remontant vers l’ancrage sommital pour ensuite retomber vers le grimpeur.

Un peu d’histoire…

Dans les premiers temps de l’alpinisme, lorsque le grimpeur ne pouvait pas désescalader un passage, les descentes s’effectuaient sur les cordes à la force des bras, « à bras-carrés », sans assurage… Attachée au sommet par l’une de ses extrémités, la corde était bien souvent abandonnée sur place. Dès 1864, Edward Whymper fût le premier à avoir l’idée de placer la corde en double, pour pouvoir la « rappeler » depuis en bas. D’autres méthodes furent employées pour descendre à l’aide des cordes, au moyen de « clés » autour des pieds et des mains, ou encore comme la descente « à la valaisanne », corps perpendiculaire à la paroi, tourné vers le bas, les cordes croisées sur le ventre et tenues ensuite dans chaque main les bras « en croix »… Fonctionne sur des dalles pas trop raides! A ne pas tenter sans entraînement, et auto-assurage impossible!!!

Hans Johannes Dülfer, alpiniste allemand talentueux et inventif, est né le 23 mai 1892 à Barmen/Wuppertal et mort le 15 juin 1915 pendant la première guerre mondiale. Durant sa courte vie, il inventa le mousqueton en 1914 (140gr. d’acier!) et les pitons… Il développa également plusieurs techniques d’escalade, dont la plus connue encore aujourd’hui est celle de l’escalade en opposition. On dit maintenant « remonter la fissure en Dülfer… ». Ce qui est moins connu, c’est qu’il est également l’inventeur de la technique de descente en rappel. Il a développé la méthode de mise place « en S » de la corde sur le corps afin de se freiner et de maîtriser sa descente en employant les 2 brins de corde, méthode que l’on peut décrire comme suit:

  • Pour un droitier: les 2 cordes sont passées entre les jambes, reviennent devant le bassin par le côté droit, croisent le corps par devant jusqu’à l’épaule gauche, passent derrière la nuque et reviennent par derrière dans le dos jusque dans la main droite. Le freinage est augmenté en ramenant la main droite vers l’avant. Il est indispensable de bien positionner la corde entre les jambes (!) et de très bien protéger la nuque contre le frottement de la corde!

Au début, il n’y avait aucun moyen de s’auto-assurer pendant la descente, et bon nombre d’alpinistes ont payé de leur vie leurs erreurs de manipulation, généralement une mauvaise mise en place de la corde sur l’épaule conduisant à la brûlure ou la paralysie… Le confort a été un peu amélioré lorsque, plutôt que de passer la corde entre les jambes, on eut l’idée d’installer un anneau de corde ou de sangle au niveau du bassin et de faire passer les cordes dans un mousqueton. En 1915, un professeur de musique autrichien, Karl Prusik, inventa ce nœud pour réparer les cordes d’instruments de musique. En 1931, il publie ce nœud dans le milieu de la montagne, et celui-ci deviendra vite un synonyme de sécurité pour toutes les manœuvres de corde.

La descente en rappel « à la Dülfer » a été employée jusque dans les années 1960, période à laquelle se sont démocratisés les premiers engins de freinage, les « descendeurs ».

A peu près à la même époque sont apparus les premiers baudriers, qui ont révolutionné le confort et la sécurité. En outre, ils ont permis de fixer facilement les engins de descente.

Pierre Allain, né le 7 janvier 1904 et décédé en 2000, fut un célèbre grimpeur et auteur de nombreuses premières ascensions dans le massif du mont-Blanc, dont la face Nord des Drus en 1935 avec sa fameuse « fissure Allain », premier passage de VIème degré dans le massif. Il est aussi l’inventeur de bon nombre d’accessoires d’escalade, notamment des premiers chaussons d’escalade, les fameux « P.A. », du premier mousqueton en alliage d’aluminium léger (67gr.!) en 1933 , et du premier descendeur en 1943! En forme de T, avec des ergots pour maintenir les cordes en place, c’est l’un des précurseurs du descendeur en « 8 ».

En effet, à peu près à la même époque, un alpiniste fribourgeois, Jean Briod, passe ses vacances à La Fouly, en Valais. Il développe et forge au feu de bois son premier descendeur… Deux pièces forgées sont assemblées sur un morceau de frêne, provenant vraisemblablement d’un manche de piolet! Il pèse 376g, auxquels viennent s’ajouter 126g pour le mousqueton en acier… C’est selon toute vraisemblance l’ancêtre du tube actuel. En effet, la corde suit le même chemin que dans un tube moderne, elle ne peut pas sortir accidentellement, le mousqueton « fermant » le système. L’idée fait son chemin, et dans les années 1960, J. Briod passe à « l’industrialisation » avec Louis Grandjean, en modifiant quelque peu la forme originale. Il s’allège, 270g, le bois est remplacé par un tube en fer, et la corde ne peut plus sortir du descendeur si on la passe comme dans un « huit » moderne. Dans les années 1970, deux alpinistes et « bricoleurs », Favre et Mauron s’associent pour sortir le FAMAU, copie du Briod, mais plus léger en fonte d’aluminium, 210g. Louis Grandjean et son fils Jacques ne peuvent pas ne pas réagir à ce plagia, et copient à leur tour le FAMAU en l’allégeant au passage, 105g! Mais ils ne passeront jamais à la production en série!

Il faudra attendre les années 1960 et le développement de l’idée de Pierre Allain par d’autres fabricants pour que les utilisateurs prennent confiance et que l’emploi du descendeur devienne plus populaire. (Le huit de PA ci-dessous m’a été donné par Boris Guignard. Merci à lui!)

Parallèlement, d’autres idées de frein voient le jour. C’est le cas du descendeur MAGNONE, conçu par Guido Magnone, grimpeur talentueux et co-fondateur de l’UCPA en France. Son idée est reprise et développée par Charlet-Moser, avec son descendeur composé d’une plaque en tôle coudée en U, qui se mettait à cheval sur un mousqueton. Le principe de la pièce mobile sur laquelle la corde vient frotter sera encore reprise par le descendeur suisse « Hans », puis par BONAITI, et sera progressivement abandonnée.

Dans les années 1970, la maison Salewa sort sa plaquette STICHT, sur une idée de Franz Sticht. D’abord conçue pour une seule corde, elle est logiquement complétée d’une deuxième fente pour permettre le passage de 2 cordes: le système « plaquette » est né. C’est également le premier engin qui permette la descente en rappel et l’assurage du premier! La plaquette sera améliorée par la suite avec l’adjonction d’un ressort permettant de garder un espace entre la plaquette et le mousqueton, facilitant le coulissement de la corde pour l’assurage du premier! Tous les systèmes comme les tubes, plaquette NEW-ALP (Jean-Paul Fréchin,France), GiGi (Italie), puis REVERSO (France), ATC (USA), SMART ALPINE (Suisse), ALPINE UP (Italie), Mega Jul (Allemagne) etc, sont des dérivés de la première plaquette STICHT…

Depuis le début des années 1990, divers projets de descendeurs plus ou moins « autobloquants » sont présentés, sans toutefois convaincre le marché.

  • EN 1994, la société ALPTECH (France) voit le jour. L’ABS est leur premier engin autobloquant, mais fonctionnant sur corde à simple. Un premier prototype de descendeur pour corde à double, idée du guide chamoniard Vincent Couttex et de l’ingénieur Hubert Boissier en 1996/97 n’aboutira pas sur le marché. Mais Vincent Couttex n’abandonne pas l’idée, et se fait aider dans ses recherches et ses développements par de nombreux collègues. Reprenant une idée de Jean-Paul Fréchin, autre guide chamoniard plein d’idées! (premier mousqueton coudé, premier mousqueton « key-lock », inventeur de la très fameuse plaquette NEW-ALP !), l’équipe développe et sort le descendeur MASCOTT en 2010, premier descendeur autobloquant. Les cordes épaisses ne sont pas tellement compatibles, leur coulissement n’étant pas confortable. Dans sa notice d’emploi, Alptech ne déconseille pas non plus de continuer à effectuer un nœud autobloquant pour s’auto-assurer dans la descente…
  • En 2009, Mammut sort le SMART, suivi en 2011 par le SMART ALPINE, descendeur-assureur pour cordes à double. Nul n’est prophète en son pays, cet appareil rencontre un franc succès, mais hors des frontières suisses… un jour sûrement…? Absolument fiable et efficace, il n’a pas son pareil en terme de confort dans la fonction plaquette pour assurer deux seconds de cordée! Afin d’éviter le coincement des cordes plus fines, deux largeurs d’appareil sont disponibles selon le diamètre des cordes employées. La descente en rappel est aussi confortable, demandant une petite période d’adaptation à l’engin. La fonction « autobloquante » est relative en rappel, fonctionnant assez bien en début de rappel lorsque les cordes pèsent encore de tout leur poids, mais très limitée en fin de rappel, lorsque le poids des cordes est devenu trop infime. Donc l’emploi d’un nœud autobloquant est indispensable.
  • En 2012, Climbing Technology sort le ALPINE UP, engin qui présente les mêmes fonctionnalités. Efficace, mais demandant un bon apprentissage, tellement les possibilités d’introduire les cordes sont nombreuses. Il ne faut en outre absolument pas lâcher les cordes avant que le blocage ne soit effectif aussi bien dans la position d’assurage que celle de descente. Donc nœud autobloquant également indispensable.
  • Dans le même esprit, en 2013, l’allemand Edelrid propose le Micro Jul et Mega Jul, tubes multi-fonctions qui demandent également un apprentissage avant de se lancer dans son premier rappel dans le vide. Comme chez le Smart Alpine, la fonction d’auto-blocage des cordes diminue au fur et mesure qu’on se rapproche de la fin du rappel. Pour que la fonction autobloquante puisse fonctionner, il faut tout de même un certain poids de cordes en-dessous de l’appareil.

A ce jour, l’appareil miracle qui remplisse à merveille toutes les fonctions dont on a besoin en paroi n’existe pas encore. C’est pourquoi il reste indispensable de toujours s’auto-assurer au moyen d’un anneau de cordelette et d’un nœud autobloquant. C’est encore et toujours la seule assurance-vie valable dans toutes les manœuvres de rappel, quel que soit l’appareil employé.

Techniques de rappel:

On distingue ainsi deux grandes familles de descendeurs:

  • Les descendeurs « autonomes », sur lesquels le freinage est obtenu par frottement sur tout le corps de l’engin, type « 8 »
    • Avantages: très grande simplicité de mise en place des cordes, les cordes ne peuvent pas sortir du système et il est quasiment impossible de mal les accrocher. Fonctionne assez bien avec des cordes gelées
    • Inconvénients: peu efficace comme système d’assurage, brûle et vrille les cordes
  • Les descendeurs combinant l’emploi d’un ou plusieurs mousquetons , type plaquette et tube
    • Avantages: grande efficacité en assurage, polyvalence au relais lorsque l’engin dispose d’un anneau de fixation au relais, meilleure diffusion de la chaleur
    • Inconvénients: grand danger si l’on « oublie » de passer une des 2 cordes (de nuit p.ex.!), passage des cordes gelées problématique pour les petits modèles

Des méthodes dites de « réchappe » existent pour pallier à la perte de son descendeur, dont les 2 plus simples:

  • La première, et la plus simple, consiste à employer un mousqueton à vis en forme de poire et d’y placer les cordes après avoir effectué le demi-nœud de cabestan, ou demi-nœud d’amarre, sur les 2 brins ensemble. Ce nœud a été inventé par Werner Munter, guide suisse. Efficace, simple, mais qui imprime à la corde une fâcheuse tendance à vriller, ce nœud nécessite un mousqueton dit HMS (Halb Mastwurf Sicherung), ayant un côté suffisamment grand pour permettre au nœud de se retourner, ou encore un mousqueton ovale, qui peut être employé sur ses deux extrémités.
  • La seconde méthode de « réchappe » nécessite au moins 3 mousquetons, que l’on va positionner en chaîne pour les 2 premiers, et le troisième en travers du 2ème. Les 2 cordes doivent passer par-dessus le côté plein du 3ème mousqueton. Un freinage plus important peut être obtenu en mettant un 4ème mousqueton parallèle au troisième, en travers. Technique efficace, mais qui demande la maîtrise de la mise en place correcte des mousquetons et des cordes. Attention à ne pas perdre les 3ème et 4ème mousquetons en bas du rappel!
  • Dans les 2 cas, il est également indispensable de s’auto-assurer! Attention: sur les photos en exemple, le nœud de huit n’est plus recommandé!!!

Jonction des cordes:

Lorsque l’on veut joindre 2 cordes entre elles pour profiter de leur longueur totale, on doit effectuer un nœud.

Parmi tous les nœuds connus, les nœuds de « huit » et le nœud « simple » ont été les plus utilisés jusqu’à aujourd’hui. Mais suite à de trop nombreux accidents de rappel, il est devenu fortement déconseillé de continuer à employer le nœud de huit pour joindre 2 cordes de rappel. Les Américains l’appellent le EDK (European Death Knot)!

Attention: Le nœud de huit a tendance à rouler sur lui-même à partir de 50kg de traction si le nœud n’est pas serré correctement! En outre, il ne permet pas de relier ensemble 2 cordes de diamètres différents.

Il est donc judicieux de le remplacer par le nœud « simple doublé » !

  • Les avantages du nœud « simple doublé (ou de « plein poing doublé »):
    • c’est le plus sûr des nœuds de jonction pour joindre deux cordes, même de diamètres différents
    • facile à effectuer
    • n’a pas tendance à rouler sur lui-même, puisque le nœud sous tension s’arrête contre le second
    • les nœuds se positionnent toujours sur le dessus lorsqu’on tire la corde, diminuant ainsi la résistance due au frottement sur le rocher et lorsqu’ils doivent passer par-dessus les aspérités
    • La corde a moins tendance à souffrir du frottement du nœud sur le rocher qu’avec un nœud de pêcheur
    • permet de joindre 2 cordes de diamètres différents
    • plus facile à défaire que tous les autres nœuds après tension
  • Les inconvénients du nœud « simple doublé »:
    • plus long à exécuter
    • … ?

On doit donc toujours observer les précautions suivantes:

  • mettre côte à côte et bien aligner les 2 brins de cordes à l’intérieur des nœuds
  • bien serrer le nœud en tirant sur chacun des 4 brins du premier nœud, puis sur les 2 brins de corde derrière le deuxième en le faisant bien plaquer au premier
  • effectuer les nœuds en prenant soin de laisser 30cm libres au bout des 2 cordes

Conseil futé n°1:

Pour la première mise en place des cordes, on peut passer un des brins dans le/les anneaux de rappel et nouer les cordes ensuite. Ne pas nouer les cordes entre les 2 anneaux! Il est très important de toujours placer le nœud du côté du rocher (entre le rocher et l’anneau si celui-ci est parallèle au rocher). Lorsque l’on va tirer la corde depuis le bas, la traction aura tendance à décoller l’anneau du rocher et à libérer la corde descendante. (Si l’on place le nœud par erreur au-dessus de l’anneau, la traction venant du bas va alors plaquer l’anneau contre le rocher et verrouiller la corde montante. Dans le pire des scénarios, on sera obligé de remonter pour débloquer le tout…) Dans le cas où l’anneau est perpendiculaire au rocher, la position du nœud est fonction de la direction de traction la plus avantageuse. Attention à bien décaler le brin du côté du nœud vers le bas, pour éviter que le nœud ne se mette à cheval sur l’anneau.

Conseil futé n°2:

Pour être sûr de tirer la bonne corde une fois en bas de son rappel, on peut mousquetonner avec sa longe d’auto-assurage le côté où il y a le nœud de liaison. Une fois en bas, on tire la corde juste à tous les coups! Le premier en bas du rappel peut aussi faire un essai de traction, le deuxième pouvant ainsi remédier à un éventuel souci avant de descendre.

Pour effectuer les nœuds autobloquants, il est préférable de n’employer que de la cordelette de 5, 5.5 ou 6 mm

En principe, toutes les cordelettes disponibles à la coupe sur le marché sont gainées de polyamide ou de polyester. La surface de ces 2 fibres est suffisamment rugueuse pour assurer une bonne prise du nœud autobloquant sur les cordes.

Il existe depuis peu sur le marché des anneaux de cordelettes cousus. Comme au terme de la norme, il s’agit d’un « anneau cousu », leur âme est obligatoirement composée de fibres PEHD (Dyneema ou Spectra) ou d’Aramide (Kevlar), seules fibres permettant d’atteindre la résistance homologuée de 22kN avec un si petit diamètre. Autour de l’âme, leur gaine tressée sera également fabriquée avec du polyamide ou du polyester, donc l’âme sera protégée du frottement et les fibres PEHD ou Aramide glissantes ne seront pas en contact avec les cordes de rappel. Ces anneaux sont donc beaucoup plus solides que ceux bricolés par le grimpeur à partir de cordelette « au mètre », et les coutures sont plus sûres que les nœuds faits maison. Enfin, leur résistance de 22kN permettra de les employer comme point d’ancrage intermédiaire, au même titre qu’un anneau conventionnel en sangle, et on ne peut donc que les recommander!

N’employer une sangle PEHD pour effectuer un nœud autobloquant que dans le cas où l’on ne dispose plus de cordelette. La fibre PEHD risque de fondre suite au frottement sur les cordes si la descente est trop rapide! De plus, la fibre PEHD qui est très lisse a tendance à glisser. L’effet autobloquant est donc nettement moins efficace, et il faut impérativement faire le Prusik triple ou le Machard en tournant la sangle au moins 6x autour des cordes de rappel.

Il existe beaucoup de nœuds autobloquants différents, ayant tous pour fonction de se bloquer sur la/les cordes en cas de forte traction. Les plus couramment employés pour l’auto-assurage en rappel sont le Prusik et le Machard.

Descente du deuxième coéquipier: auto-assuré ou assuré du bas?

Certains grimpeurs pensent pouvoir se dispenser de l’auto-assurage pour assurer la descente du/des second(s) de cordée. Il est en effet possible de contrôler la descente depuis le bas en tirant sur les 2 cordes. Cette manœuvre peut toutefois s’avérer peu sûre, dans le cas où le grimpeur qui descend viendrait à décrocher un caillou qui tomberait sur celui du bas… Donc il est préférable que chaque grimpeur soit maître de sa descente, ne serait-ce que d’un point de vue pédagogique.

Lancer les cordes:

Lors de la mise en place des cordes dans l’ancrage, il peut être utile de les amarrer provisoirement au relais avec une queue de vache, pour éviter de les perdre avant le premier lancer!

Il est recommandé de lancer les cordes séparément, afin de leur éviter de s’emmêler. Préparer la corde dans la main en faisant de grandes boucles alternées et lancer. Commencer par lancer la corde opposée au nœud de liaison: cela évitera de voir filer les 2 cordes dans le vide!

Nœud ou pas de nœud en bouts de cordes

Les deux méthodes se valent, chacune ayant leur raison d’être en fonction du terrain ou des conditions.

Si l’on veut absolument sécuriser la descente à 100%, effectuer un nœud à chaque extrémité des cordes sécurisera la manœuvre, la corde ne pouvant plus filer à travers le descendeur lorsqu’on arrive en bout de rappel. Cette méthode prend tout son sens si la descente est inconnue, que la météo est défavorable, que l’on est lourdement chargé, que l’on ne peut pas voir le bas du rappel ou le prochain relais, d’autant plus si le terrain est très raide, voire surplombant. La plus grande rigueur dans la préparation et le lancer des cordes sera de mise, les nœuds ne devant pas aller se coincer derrière un obstacle inatteignable, particulièrement par grand vent!

Attention: ne pas oublier de défaire ces nœuds avant de tirer la corde, sous peine de devoir remonter !

Mais lorsque les conditions ne sont pas ingérables, que les relais ne sont pas placés en toute fin de corde, ne pas faire de nœud simplifiera singulièrement les manipulations!

Mise en place de l’autobloquant et du descendeur:

2 possibilités s’offrent pour la position de l’autobloquant: au-dessus ou en-dessous du descendeur.

Autobloquant au-dessus du descendeur

  • Avantages:
    • intéressant au cas où l’on doit remonter sur son rappel
  • Inconvénients:
    • l’autobloquant a tendance à se serrer à fond sous le poids du grimpeur. Il peut être impossible à débloquer si les cordes sont mouillées ou gelées!
    • une seule main contrôle la vitesse, l’autre étant occupée au-dessus du descendeur à faire coulisser l’autobloquant
    • ne permet pas une mise en place confortable du descendeur sur les cordes
    • peut compliquer le départ du rappel

Autobloquant en-dessous du descendeur

  • Avantages:
    • permet de conserver les 2 mains en-dessous du descendeur, et donc de participer ensemble au freinage
    • permet de maîtriser la descente avec une seule main si nécessaire
    • l’autobloquant ne se serre jamais à fond, le poids du grimpeur étant reporté en priorité sur le descendeur
    • facilite la mise en place du descendeur sur la corde
    • facilite le départ du rappel
  • Inconvénients:
    • ne permet pas de remonter directement sur les cordes en cas de nécessité

Conseil futé: Pour mettre en place les cordes dans le descendeur, commencer par soulager le poids des cordes, en mettant en place le nœud autobloquant sur la corde et en le fixant au bas du pontet du cuissard avec un mousqueton de sécurité. Remonter ensuite d’environ 50 cm les 2 brins de corde, en faisant coulisser simultanément l’autobloquant vers le bas. Les cordes sont alors retenues par l’autobloquant, et peuvent facilement être mises en place dans le descendeur, qui viendra ensuite fixé au pontet par l’intermédiaire d’une longe, elle-même attachée au-dessus de l’autobloquant dans le pontet.

Avant le départ en rappel:

  1. Contrôler la position des cordes dans l’ancrage
  2. Contrôler le nœud de liaison des 2 cordes
  3. Contrôler l’emplacement du nœud de liaison
  4. Contrôler le nœud autobloquant et son mousqueton
  5. Contrôler la position du descendeur et de son mousqueton
  6. Retirer sa longe d’auto-assurage et clipper celle-ci sur la corde que l’on devra tirer depuis le bas du rappel (mnémotechnique)

Après le départ et pendant le rappel:

  1. Contrôler le bon emplacement de la corde sur le rocher, éviter les angles vifs! La corde sous tension est plus vulnérable, et les angles ou les fissures vont aussi compliquer le tirage de la corde depuis le bas
  2. Contrôler le bon emplacement de la corde tout au long de la descente, éviter de laisser les cordes dans les fissures ou sur les angles vifs

En bas du rappel:

  1. Avant de s’attacher au relais suivant, en restant pendu dans son rappel, CONTRÔLER LA SOLIDITÉ DU RELAIS, au besoin renforcer ou remplacer les anneaux de sangle ou de corde déjà en place, retaper les pitons, resserrer les plaquettes si elles bougent, renforcer le relais avec un coinceur ou une vis à glace selon le terrain
  2. Fixer la corde que l’on devra tirer vers soi (mnémotechnique)
  3. S’auto-assurer immédiatement au relais, si besoin relier les points du relais
  4. Libérer le descendeur en le ré-accrochant tout de suite à son mousqueton avant de sortir les cordes: évite de se brûler ou de perdre l’appareil!
  5. Conserver l’autobloquant sur les cordes en prenant 1 ou 2 mètres de mou (redondance de sécurité, permet d’être doublement assuré sans déranger la descente du coéquipier et permet de conserver les cordes sous la main pour aider son coéquipier dans les descentes désaxées ou surplombantes)
  6. Vérifier le bon coulissement des cordes, afin que le grimpeur resté en haut puisse encore modifier la position des cordes au niveau du relais si nécessaire
  7. Avertir son coéquipier: « Gaston, cordes libres! »
  8. Préparer la suite de la descente, en introduisant déjà le brin que l’on va tirer dans l’ancrage en anticipant la position finale du nœud de liaison

Tirer le rappel:

  • Après avoir passé le brin que l’on doit tirer, depuis l’arrière vers l’avant en cas d’anneau parallèle au rocher, passer le brin remontant dans une dégaine au relais, sans le bloquer. Cela permettra le cas échéant de maîtriser sa remontée, en soulageant son poids, de le retirer en arrière si la corde se coince, de secouer les cordes si nécessaire, de contrôler enfin qu’il n’y a pas de nœud à l’extrémité de la corde montante
  • Lorsque l’on sent que la corde commence à coulisser d’elle même dans l’ancrage du haut, il est parfois utile de donner une traction plus vigoureuse pour décoller l’extrémité de la corde et lui permettre de se dégager de la paroi au lieu de la laisser couler et de risquer de la coincer autour d’un bloc, d’un arbre ou dans une fissure
  • Se protéger la tête contre les blocs pouvant être détachés par la corde, et également contre l’extrémité de la corde qui tombe en principe d’une hauteur de 50 m ou 60 m, et qui peut couper la peau du visage!

Bonnes descentes!